Tiuccia : Instalation de la Croix sur le Castellu, Noël 2025

Ce matin de Noël 2025, sur le site historique du Castellu à Tiuccia, commune de Casaglione, fut installée par hélicoptère une croix qui, à présent, surplombe le golfe de la Cinarca.

Tout un symbole, cette action patrimoniale et fédératrice trouve sa place au cœur d’un héritage historique corse profond.

En effet, si aujourd’hui le Castellu ne ressemble guère plus qu'à une montage, il ne fut pas moins, comme son nom l’indique, autrefois un château, bastion principal des Seigneurs de la Cinarca qui ont laissé leur nom à la piève et qui ont profondément marqué l’histoire de la Corse entière.

La Dynastie des Cinarchesi fut fondée par Ugo Colonna, patricien romain qui en 814 sur mandat de Charlemagne, chassa les Sarrasins qui venaient d’envahir l'île. 
Personnage semi-légendaire, Ugo Colonna reste dans la mémoire historique et mythologique du peuple corse comme le premier d’une série de héros qui viendront secourir la Corse à divers moments périlleux de son histoire. 
Installant ainsi son château et son siège ici, en ce lieu aujourd’hui appelé Tiuccia, Ugo Colonna à la suite de son succès fut couronné Comte de Corse. Ce titre resta associé à sa descendance qui était la seule à pouvoir le revendiquer, à la condition d’unifier l'île et d’avoir l’assentiment du peuple, marquant ainsi de façon légendaire la naissance de l’esprit démocratique corse.

Les fiefs de ces Cinarchesi, dont le Castellu fut la terre natale et d’une certaine manière la capitale, étaient pour la plupart basés dans l’en deçà des monts, c’est pour cela que le Sud de la Corse fut surnommé la Terre des seigneurs tandis que la Haute Corse, l’en deçà des monts, fut, elle, la Terre de la Commune, devenue par la suite la Terre du Commun, de par ce même héritage démocratique.

C’est néanmoins ce même esprit de liberté et d’égalité du peuple corse qui chassa les seigneurs de la Cinarca, qui loin de leurs glorieux ancêtres accablaient le peuple d'impôts et se désintéressaient de leurs obligations féodales. 
Cette fin de la noblesse et de la monarchie en quelque sorte fut achevée par un autre héro semi légendaire de l’épopée corse Sambucucciu d’Alendu, qui, en 1357, profitant de la volonté des génois républicains de se débarrasser des seigneurs et de se poser en protecteurs de l'île et de la liberté du peuple (promesse qu’ils trahirent), souleva le peuple et le mena à la victoire mettant fin aux privilèges et aux titres des seigneurs mais rasant aussi leur château, dont le Castellu fut l’exemple le plus frappant et dont il ne reste plus aujourd’hui guère que quelques pierres autour d’un éperon rocheux dont elles ne se distinguent que difficilement.

L’installation de ce calvaire, Croix dominant en majesté le golfe sous la lumière de Noël, permit ainsi à l'assemblée de se remémorer, près de 1200 ans plus tard, qu’autrefois ici se tenait le siège du pouvoir dominant toute la Corse, terre consacrée.

C’est ainsi à la fois en hommage à la spiritualité des corses mais aussi à cet héritage historique particulier de la région de la Cinarca que cette opération eut lieu. Il fut prononcé un touchant discours sur le lien unissant les Corses à leurs racines et que fut entonné, après l'installation de la croix à 200 mètres d’altitude, un Dio Vi Salvi Regina.

Réalisée par une initiative purement locale et citoyenne, l'installation de cette croix qui maintenant est visible de la piève, témoigne, dans le contexte des “polémiques” concernant la croix de Quasquara, de l’attachement des corses à leurs racines chrétiennes, autant vis à vis de la classe politique qui s’était fédérée de façon unanime et transpartisane sur la question, que du peuple lui même qui a multiplié les actions d'installation de croix sur toute l'Île. 

Si, frénésie des fêtes de la Nativité oblige, le Cardinal Bustillo n’a pu être directement présent pour bénir la croix (une bénédiction ultérieure serait à envisager sur site), il fut néanmoins d’une certaine façon présent de part la distribution aux courageux, qui le matin de Noël ont gravi le sentier difficile pour assister à l'installation, de croix franciscaines bénies par le très populaire évêque d’Ajaccio. Choix d’une croix franciscaine d’autant plus ancrée dans l’histoire patrimoniale du site car la chapelle de l’ancien château était dédiée à Saint Antoine, rappelant le passé religieux et le lien historique puissant qu’il existe entre l'île et l’ordre. 
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